
"L'Amérique
s'en sort toujours..."
CG

Dire
qu'Hollywood se mord le bout de la queue tient de l'euphémisme.
Après Massacre à la tronçonneuse et
en attendant Amityville, c'est donc au tour du Zombie
de G. Romero, monument de gore qui tâche et de subversion
king-size, de passer à la moulinette. Et pour une
fois, on n'en sera pas fâché (surtout au vu des Resident
Evil PG-13 qu'on est obligé de se farcir), vu que cette
tâche délicate a été confiée à
Zack Snyder, un vrai nerd dont la seule ambition se borne
à nous pondre le survival rêvé. Ni plus,
ni moins.
Quoi
de neuf chez les zombards, alors ? Changement d'époque oblige,
nos copains morts-vivants piquent désormais des sprints dantesques
(probablement conditionné par un quotidien stressant), histoire
de vous béqueter un bout d'encéphale. On est bien
loin de l'image archétypal du zombi 70's qui boite en criant
"cerveeeelle", et qui malgré son rythme
de croisière mortuaire, parvient tout de même à
rattraper la blondasse à oilpé, qu'avait pourtant
33 fois le temps de battre le record du 400m, mais bon, hein, c'est
con d'avoir trébucher sur cette pierre tombale, cela dit
quelle idée de planter une pierre tombale en plein milieu
d'un trottoir, hein ? Le genre de changement qui pourrait paraître
anecdotique mais se révèle réellement significatif
dans une appréhension plus globale de la chose, et très
révélateur d'un état d'esprit inhérent
à notre époque.
Plus
qu'une relecture "faster, lourder, blooder", L'armée
des morts est avant tout une variation sur le mythe des revenants
anthropophages si cher à notre cur. Un mythe fort propice
à une satire de l'individualisme généré
par notre système libéral (combien de zombis croisons
nous chaque jour dans les couloirs du métro ?) et, contexte
du supermarket oblige, de la société de consommation,
toutefois plus marqué dans l'original de Romero et que le
réal du remake délaisse au profit d'une élégie
du chaos qui pourrait paraître vaguement décérébrée,
et un poil rétrograde, à nos amis âmes sensibles
ou coincés du cul, mais diantre, ça fait un bien fou
là où ça passe !
On
réfléchit moins et on tire plus, donc. Le plaisir
ressenti à la projection en ressort grandi, même si
la matière grise s'en trouve conséquemment moins sollicitée.
Et pourtant
Les mauvaises langues qui diront que le film de
Snyder, nerveux et saignant, tient plus du steak tartare que de
l'uvre d'art, se trompent. Sous ces dehors d'abattoir du genre
humain, L'armée des morts se permet une analyse ontologique
des rapports entre les individus, le survival étant,
à l'instar du film de guerre (et le rapprochement trouve
un écho troublant dans la traduction du titre français),
un genre particulièrement propice à ce type d'étude
des comportements. Ici et comme dans bon nombre de ces films, l'instinct
de survie exacerbe les sentiments les plus enfouis, allant de l'héroïsme
insoupçonné à une veulerie sans pareille. Rien
de tel qu'une petite vague de zombis pour savoir ce que vous avez
dans le ventre, en somme (au propre comme au figuré, d'ailleurs).
Tout
en cultivant un comique de situation bienvenue ("Don't worry
be happy") et un second degré imposé (les
clins d'il passent plutôt bien), L'armée des
morts prend son boulot au sérieux et, sans être
tout à fait dépourvu de défauts, s'impose comme
le zombie-movies le plus fun qu'on ait vu depuis un bon bout de
temps. Enfin, au vu du nihilisme crados dans lequel il baigne, le
film de Snyder prouve que l'ère Reagannienne au cinéma
est définitivement enterrée. Qu'elle repose en paix.
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* le prégénérique, où comment le monde bascula
dans le chaos (gaaaa !!!!)
* trashy, crados, vaguement désespéré, bref, tout
à fait réjouissant
* le générique final barré, sur "Down with
the sickness" de DISTURBED

* petite baisse
de rythme vers le milieu
* quelques clichés qui attendent toujours d'être dynamités

...la fusion entre les films de Romero et la pop culture des 00's, ou
quand Diogène rencontre Britney, alors Dawn of the dead est
fait pour vous.

En parvenant à réinventer son modèle, Snyder
nous offre sa vision personnelle de l'apocalypse. Au final, son film est
aussi jouissif à visionner qu'intéressant à analyser,
non pas tant par les thèmes qu'il aborde (on n'est pas chez Godard,
non plus) mais par le miroir qu'il tend à une société
malade de l'intérieur, et dont il se fait le fascinant reflet.

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L'armée
des morts (Dawn of the dead)
Film américain (2003). Epouvante-horreur. Durée :
1h 40mn. Interdit aux moins de 16 ansRemake de ZombieDate de sortie
: 30 Juin 2004
Réalisation,
production, distribution
Réalisateur : Zack Snyder
Scénariste : James Gunn, George A. Romero
Producteur : Richard P. Rubinstein, Marc Abraham, Eric Newman
Production : Strike Entertainment, U.S.A. Metropolitan FilmExport,
France, Universal Pictures, U.S.A. New Amsterdam Entertainment Inc.,
U.S.A.
Distribution : Metropolitan FilmExport, France Acteur(s)
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Acteur(s)
Sarah Polley : Ana
Ving Rhames
: Kenneth
Jake Weber :
Michael
Mekhi Phifer : André
Ty Burrell : Steve
Michael Kelly : CJ
Kevin Zegers : Terry
Lindy Booth : Nicole
Michael Barry : Bart
Jayne Eastwood : Norma
Boyd Banks : Tucker
Inna Korobkina : Luda
Ken Foree : le télévangeliste
Tom Savini : le shérif
Scott H. Reiniger : le général
Zack Snyder (non crédité) : un commando
Equipe Technique
D'après l'oeuvre de George A. Romero
Compositeur : Tyler Bates
Directeur de la photographie : Matthew F. Leonetti
Costumière
: Denise Cronenberg
Maquilleur :
David LeRoy Anderson
Cascadeurs :
John Stoneham Jr.
Chef décorateur
: Andrew Neskoromny
Animation et
effets visuels : Aaron Weintraub, Dennis Berardi
Producteur exécutif
: Thomas A. Bliss, Armyan Bernstein, Denis E. Jones
Chef monteur
: Niven Howie

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